Henry Thomas Shepherd : le premier sergent-major régimentaire noir au Canada

Black and White image of a seated man. He is wearing a suit. On his suit are medals.

Henry Thomas Shepherd était un homme remarquable. Vétéran des Première et Deuxième Guerres mondiales, Henry a marqué l’histoire en 1935 lorsqu’il est devenu le premier Noir au Canada à être nommé sergent-major d’un régiment. Outre ses exploits militaires, Henry reste une figure marquante et un pilier de la communauté de Georgetown, en Ontario.

Sa famille et son enfance

Pour mieux comprendre la vie d’Henry, il faut d’abord se pencher sur l’histoire de la famille Shepherd. Le père d’Henry Thomas, John Henry Shepherd, est arrivé au Canada dans les années 1850 avec sa mère alors qu’il était encore enfant. Mme Shepherd était une femme en quête de liberté qui s’est échappée des États-Unis vers le Canada par le chemin de fer clandestin. La famille Shepherd s’est installée à Georgetown, en Ontario, où elle vivait dans une petite cabane sur ce qui est aujourd’hui le site de l’Exposition de Georgetown. Mme Shepherd travaillait comme femme de ménage chez le colonel John Murray. En plus d’être maître de poste à Stewarttown, en Ontario, John Murray était officier au sein du 20th Halton Battalion, un bataillon qui, quelques années plus tard, jouerait un rôle clé dans la vie d’Henry Thomas. Chaque jour, John accompagnait sa mère à pied le long de la voie ferrée jusqu’à la ferme Murray, ainsi que sur le chemin du retour.

D’après les registres, Mme Shepherd serait décédée peu avant 1871. Avant sa mort, elle avait convenu avec le colonel Murray que s’il lui arrivait quoi que ce soit, il prendrait soin du jeune John jusqu’à ce qu’il soit en âge de subvenir à ses besoins. Après le décès de sa mère, John s’est installé à la ferme Murray pour y travailler comme ouvrier agricole. C’est à cet endroit qu’il a rencontré Sarah Hartley. Sarah est arrivée au Canada en 1886, à l’âge de 16 ans. Elle faisait partie des 100 000 « petits immigrants britanniques » (British Home Children) envoyés au Canada entre 1869 et 1939. John et Sarah se sont mariés en 1887 et ont eu six enfants, dont Henry Thomas Shepherd, l’avant-dernier.

Henry Thomas Shepherd est né le 18 août 1895. Dans son enfance, il a fréquenté les écoles de Stewarttown et de Georgetown. En 1911, il a rejoint le Halton Rifles (anciennement le 20th Halton Battalion). Peu après la fin de ses études, il a trouvé un emploi chez Coated Paper Mill, une usine de papier couché où travaillait son père.

Henry à la guerre

Lorsque la Première Guerre mondiale a éclaté en 1914, des Canadiens de partout au pays ont rejoint le Corps expéditionnaire canadien pour participer aux combats à l’étranger. Parmi les quelque 1300 Canadiens noirs qui se sont enrôlés, seulement 500 d’entre eux, dont Henry, ont servi dans des bataillons non ségrégués. Pour en savoir plus sur l’expérience d’Henry pendant la guerre, explorez le tableau ci-dessous.

Henry n’est pas le seul Shepherd à avoir combattu pendant la Première Guerre mondiale. John, son frère cadet, a servi dans le 123ᵉ bataillon. Bien qu’il ait été blessé lors des combats en France, en 1917, il a survécu à la guerre. De retour au pays, il est devenu pompier volontaire et membre de la fanfare locale. Lors de la Deuxième Guerre mondiale, il a rejoint la Garde des anciens combattants.

L’entre-deux-guerres

À son retour au pays, Henry est retourné travailler à l’usine Coated Paper Mill. En 1923, il épousa Susanna Maude Cox. Susanna Maude travaillait avec les sœurs d’Henry dans une usine de gants de la région, et ce sont elles qui les ont présentés. Ensemble, Henry et Susanna Maude ont eu huit enfants.

Henry est resté un membre actif de la communauté militaire locale. Dès son retour à la maison, il s’est engagé dans les Halton Rifles. En 1928, il a participé à la création de la Légion de Georgetown. À plusieurs reprises, il a également joué le rôle de maître de cérémonie du défilé à l’occasion des commémorations du jour du Souvenir à Georgetown. Les aptitudes d’Henry en tant que soldat et leader ne sont pas passées inaperçues auprès de son régiment. En 1935, Henry a été nommé sergent-major régimentaire. Ce fut un moment historique, car c’était la toute première fois dans l’histoire du Canada qu’une personne noire occupait ce poste. Un an plus tard, les Halton Rifles ont fusionné avec le régiment Peel et Dufferin pour former les Lorne Scots. Henry continua à servir comme sergent-major régimentaire au sein des Lorne Scots jusqu’en 1939. Pour en savoir plus sur le parcours d’Henry entre les guerres, consultez le tableau ci-dessous.

Image en noir et blanc d'un homme et d'une femme. Ils sont tous deux debout et souriants. L'homme, à gauche, porte un gilet de costume avec une chaîne de montre à gousset en travers. La femme (à droite) porte une chemise et une jupe avec une bande noire autour du centre. Elle a le bras autour de l'homme.
Henry et son épouse Susanna Maude Cox (famille Shepherd).

Deuxième Guerre mondiale

Image en noir et blanc de deux hommes entourés d'une foule assise. Les hommes se font face. L'homme de gauche porte un uniforme militaire. L'homme de droite porte un costume et épingle une médaille à l'homme de gauche.
Henry en train de recevoir le prix de l’Ordre l’Empire britannique (famille Shepherd).

Quand la Deuxième Guerre mondiale a éclaté en 1939, Henry a voulu aider son pays à nouveau. Malheureusement, les blessures qu’il avait subies durant la Première Guerre mondiale l’empêchaient de servir à l’étranger. Henry décida donc d’intégrer le Corps royal de l’intendance de l’Armée canadienne, en Ontario. Une fois sa formation terminée au manège militaire de Toronto, il a été envoyé à Newmarket pour travailler comme sergent-major de compagnie, où il formait les 1 000 recrues qui arrivaient au camp chaque mois. Henry est rapidement devenu l’un des soldats les plus aimés et les plus respectés du camp.

En mars 1943, après la fermeture du camp de Newmarket, Henry a été transféré au camp de prisonniers de guerre no 23 situé à Monteith, en Ontario. Il a été nommé sous-directeur du service des incendies de tous les camps militaires de l’Ontario. Un des incendies les plus marquants auxquels Henry a dû faire face pendant son séjour à Monteith s’est produit en décembre 1943. On peut lire ceci sur le compte rendu militaire officiel de l’événement :

« Le 15 décembre 1943, à l’aube, un incendie a éclaté en plein cœur de la salle des rapports du bataillon de la 2e compagnie du District, Corps royal de l’intendance de l’Armée canadienne. En tant que chef du service d’incendie, cet adjudant a immédiatement pris les choses en main et a fait preuve de beaucoup de courage, de débrouillardise et de sang froid en dépit des températures sous zéro, des vents violents et de ses vêtements complètement trempés. Il a dirigé efficacement les pompiers et, malgré la fumée épaisse, il s’est montré courageux en forçant l’entrée du bâtiment en feu pour orienter le jet d’eau sur le foyer de l’incendie, réussissant à le maîtriser rapidement et à sauver les bâtiments adjacents ainsi que des documents précieux à l’intérieur du bâtiment. Il a montré l’exemple en faisant preuve de leadership et de courage, tout en restant calme. »

Pour son leadership et sa bravoure ce jour-là, Henry a été nommé membre de l’Ordre l’Empire britannique et a été inscrit sur la liste des honneurs de l’anniversaire du roi pour son service en juin 1944. Peu de temps après, la légion de Georgetown lui a remis le Certificat de Mérite.

L’héritage d’Henry

Henry Shepherd est décédé le 24 juillet 1960 à l’hôpital Sunnybrook, à Toronto. Aujourd’hui, plus de 60 ans après son décès, on peut encore constater l’impact d’Henry dans sa communauté. Explorez le tableau suivant pour découvrir comment l’héritage d’Henry se perpétue dans sa ville natale.

Henry Thomas Shepherd a laissé une impression durable sur de nombreuses personnes. Son courage et son leadership en temps de guerre et en temps de paix continuent d’inspirer les habitants de Georgetown et d’ailleurs.

Article rédigé par Anthony Badame pour Je Me SouviensTraduction par Mélissa Santos.


Pour en savoir plus, visitez la galerie virtuelle de la bibliothèque publique de Halton sur Henry Thomas Shepherd (en anglais).

Honouring Bravery tient à remercier tout spécialement Kathy Brooks, Craig Brooks et Jacqueline Wootton d’avoir pris le temps de partager avec notre équipe leurs histoires et archives familiales.